LE VOYAGE DÉCROCHE LA LUNE !

Voyages dans l’espace, au fond des mers, désorganisés, immobiles…
En 2044, le salon des métiers du tourisme réunit les professionnels des nouveaux périples

2044 – Cette année, le salon des métiers du tourisme a lieu sur la Lune. Pour cette première, les experts du tourisme ont afflué. Nous sommes loin des ambiances lourdes et commerciales des salons d’antan. Tous les participants débarrassés de l’attraction terrestre paraissent aussi légers que guillerets. Les organisateurs ont fourni des combinaisons qui permettent de marcher comme sur la terre ou de s’envoyer en l’air an ayant la tête dans la Lune.

Ce salon réunit tous les secteurs porteurs du tourisme. Dans l’espace flotte une dizaine de bulles. Dans de célestes mouvements, elles se rapprochent et s’entrechoquent pour laisser passer les visiteurs d’une bulle à l’autre.

Voyages dans l’espace

Magie du lieu oblige, la première bulle est consacrée aux voyages dans l’espace. L’association des spacionateurs vante les mérites des voyages dans ce qu’on nomme désormais le « Grand monde ». Ils expliquent que depuis la mise au point de l’ascenseur spatial, le voyage s’est simplifié et donc démocratisé. Il faut une dizaine d’heures pour atteindre l’orbite géostationnaire. Ensuite, des navettes spatiales attendent les passagers. Pour eux, l’espace est un paradis du dépaysement. Outre permettre de profiter d’une vue imprenable sur la terre, l’apesanteur permet aux visiteurs d’abandonner toutes les lourdeurs terriennes. Les hôtels sont très confortables. Construits en fil de pierre lunaire avec les imprimantes 3D, ils ont des vertus aussi apaisantes que magiques.

Voyages au fond des mers

Dans la bulle suivante, les julevernistes invitent ceux qui se sentent sous l’eau avec leur job actuel à aller se reposer à vingt mille lieux sur les mers. Les hôtels sous-marins sont entièrement automatisés et robotisés. Lits, ménage, cuisine… Tout est pris en charge par des robots.
Des aclamatiseurs aident les clients à supprimer leurs angoisses. Le côtoiement des poissons aux faciès parfois peu avenants provoque souvent des réactions étonnantes chez les nantis en mal de dépaysement. De nombreux postes de muséo-plongeurs sont aussi à pourvoir dans le musée subaquatique d’Alexandrie et d’ailleurs. La chaîne hôtelière Tony Webb recrute des serveurs-corrallistes. On rappelle que 10 % des bénéfices réalisés par ces hôtels de luxe servent à entretenir les récifs coralliens.

Voyages désorganisés

La bulle suivante nomme « voyages désorganisés » en référence aux voyages organisés d’hier. « Les voyageurs veulent désormais qu’on leur organise de l’imprévu. Ils veulent être étonnés, surpris à tous les instants », explique Huhang WB, le responsable de l’espace. Pour répondre à l’attente, les aélatoiristes proposent des voyages-loto où l’on tire sa destination à l’aéroport. Ils ont aussi dans leur sac, des voyages en courant alterné qui proposent chaque jour des expériences différentes. Mais, ceux qui ont le plus de succès sont les voyages-rencontres où l’on peut partager gite, couvert, journée de travail, vie de famille avec les autochtones. « Pendant des années, les voyages étaient déterminés par des algorithmes. C’était bien, mais jamais exceptionnel. Les nouveaux voyageurs ne veulent plus être baladés par les mathématiques. Ils veulent choisir un restaurant, une activité en se basant sur les opinions des locaux », précise Huhang WB. Le voyage-rencontre a tellement de succès que, dans une ville comme Paris, hotiste est devenu un métier à temps partiel pour une personne sur 10. Ce phénomène a été accéléré avec les traducteurs automatiques qui ont supprimé les barrières des langues.

Voyages à la maison

La quatrième bulle est destinée aux casaniers du tourisme. La principale motivation de ces voyageurs du sur place est la protection de l’environnement. Ils ne veulent pas donner le dernier coup de massue à la planète en faisant voler des avions polluants. Les alentouristeurs déploient d’imagination pour convaincre que les plus belles aventures sont au pied de chez soi.
Les reality-operators racontent que, avec des lunettes de réalité augmentée, la liberté se déguste sans limites. Le voyageur peut nager sous un iceberg, se faire bronzer sur Mars, sauter d’un gratte-ciel de Tokyo… Il peut se dépasser sans prendre le risque d’être totalement dépassé.

Voyages santé

La cinquième bulle est réservée au tourisme médical : « Depuis quelques années, chaque lieu touristique a une spécialité médicale. On va à Paris pour soigner son cancer, à Bangkok pour une opération chirurgicale, Marrakech pour se refaire le portrait, à Prague pour supprimer sa myopie… », raconte le Docteur Iman. Dans ces centres, on cherche des doctouristeurs. Ces professionnels ont une compétence dans la santé et une autre dans le tourisme. Cette double approche permet de donner confiance aux touristes et de les attirer en masse : « Quand un chirurgien vous a guidé dans une randonnée, on ne remet pas en cause ses compétences médicales », explique le Docteur Iman.

Voyages dans le temps

La sixième bulle est consacrée aux voyages dans le temps. Comme les temporalistes proposent une téléportation dans le futur, elle attire de nombreux visiteurs. Les participants veulent vérifier que le voyage dans le temps est bien réel et ne continuent pas à être des réflexions farfelues de scientifiques ésotériques. À la sortie de l’expérience, les participants sont troublés. Pour autant, ils ne savent pas si c’est bien dans leur futur qu’ils ont été projetés ou dans un édulcorant. Réponse dans dix ans au minimum. En attendant, ils peuvent relire Albert Einstein qui disait : « La distinction entre passé, présent et futur ne garde que la valeur d’une illusion, si tenace soit-elle. »

Les écovoyagistes incitent les touristes à venir découvrir les dégâts du réchauffement climatique. Ils voient des villes englouties, des campagnes ravagées. Ils constatent la disparition des ours polaires après la fonte de la banquise.

Voyages en zones interdites

La septième bulle est la plus complexe d’accès. C’est logique, car elle présente les voyages dans les zones interdites, ces pays et régions rendus inaccessibles par des conflits ou des problèmes politiques, Le monde ouvert étant devenu de plus en plus petit, les voyagilleros proposent aux intrépides de franchir les murs. Si le voyageur peut se vanter d’avoir été dans des endroits interdits, il est bien précisé qu’aucune assurance ne les prend en charge.

OFFRES D’EMPLOI

Au salon des métiers, des annonces holographiques proposent différents emplois

 

Botiste

Jonglant avec le code, l’imagination, la passion du voyage, vous concevez le compagnon robotisé de voyage idéal pour chaque voyageur.
Vous intégrez ses demandes, désirs et données personnelles disponibles. Vous augmentez la base de toutes ses publications sur les réseaux sociaux.
Vous déterminez pour chacun la forme, la voix de ce compagnon.
Vous concevez un dispositif d’aide qui va assister le voyageur tant lors de la préparation (valises, passeports, formalités..), qu’au cours du voyage (activités, restaurants, rencontres..), qu’au retour (rangement, récits, montages…)

Géoguideur

Vous fabriquez des cartes interactives pour que vos clients ne perdent jamais le Nord.
Vos cartes sont holographiques, collaboratives, irremplaçables. Elles sont reliées à des chaussures qui projettent des flèches qui indiquent le chemin. Ou des boucles d’oreille qui clignotent à droite pour que vous tourniez la tête dans ce sens. Vos dispositifs peuvent s’adapter aux nombreux bugs et hacks des satellites.

Camoiriste

Vous programmez les chambres des voyageurs pour qu’ils y vivent des expériences uniques. Température de l’air, taille et orientation du lit, puissance de la douche… Vous personnalisez chaque élément. Vous faites évoluer les murs en fonction des attentes des voyageurs : œuvres d’art, films, messages, coaching sportif création de zones d’intimité… Vous vérifiez les valises et imprimez les objets manquants. Vous mettez en place un éclairage permettant de recaler les horloges internes des clients subissant les effets du décalage horaire. Vous ajoutez de la vitamine C dans les douches de ceux qui manquent de tonus.

Bagatikeur

Vous êtes en charge du maintien du lien entre le voyageur et ses valises. Si le voyageur dispose d’un sacamilou (valise-chien) vous vérifiez qu’elle n’aboie pas dans l’aéroport.
Vous garantissez la transmission d’images et messages à partir des valises. Vous mettez en place des filtres pour éviter des diffusions inappropriées.
Vous assurez le bon fonctionnement des scanners laser moléculaires qui visualisent et listent le contenu d’une valise. Vous maintenez à jour sa base de données pour que tous les produits interdits soient immédiatement repérés.